Réduire la fracture numérique 28 octobre 2025

Coupures d’Internet: Une fiche d’orientation de l’Internet Society sur les politiques publiques

Note du rédacteur: Cette fiche est une mise à jour du document intitulé « Fiche sur les politiques publiques: Coupures d’Internet », publié le 19 décembre 2019. Vous pouvez consulter la version précédente dans les archives Web.

Introduction

Les coupures d’Internet ordonnées par les gouvernements sont devenues la « nouvelle norme » dans de nombreux pays, principalement motivées par des préoccupations politiques et de sécurité nationale.

Les Nations Unies considèrent que le fait de priver les utilisateurs de l’accès à Internet, quelle que soit la justification fournie[1], constitue une mesure disproportionnée et, de ce fait, une violation de l’article 19, paragraphe 3, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Elles appellent également tous les États à veiller à ce que l’accès à Internet soit maintenu en toutes circonstances, y compris en période de troubles politiques. (La Rue, 2011)

Recommandations pour les gouvernements

  • Mesurer l’impact : pour préserver l’économie et maintenir la confiance et la fiabilité des infrastructures, les gouvernements devraient analyser l’impact négatif des coupures d’Internet sur la productivité, la confiance des entreprises et les investissements financiers à court et à long terme.

Recommandations pour la communauté technique et les acteurs du secteur

  • Construire une infrastructure résiliente : la communauté technique d’Internet, les groupes industriels et les autorités locales devraient collaborer pour déployer de nombreux points d’échange Internet répartis et diversifier la connectivité Internet aux frontières internationales. Une telle approche permet d’éviter les risques liés à un « interrupteur unique » et de limiter l’ampleur d’une coupure.
  • Diversifier les voix : les investisseurs devraient intégrer les coupures d’Internet dans leur évaluation des risques commerciaux, car une coupure peut compromettre leurs opérations et entraîner des pertes financières.

Recommandations pour la société civile

  • Assurer une fonction de surveillance : les organisations de la société civile et les autres partenaires devraient continuer à suivre et à documenter l’impact des coupures d’Internet et jouer un rôle clé en appelant les gouvernements à rendre des comptes et à faire preuve de transparence.
  • Sensibiliser : les organisations de la société civile devraient sensibiliser le public et la communauté internationale aux coûts humains, économiques et démocratiques des coupures d’Internet. Elles devraient également renforcer les capacités des groupes et des militants locaux à se préparer et à réagir.

Définition d’une « coupure d’Internet »

Les coupures d’Internet peuvent survenir au niveau national, empêchant les utilisateurs de tout le pays d’accéder à Internet, ou au niveau régional (local), interrompant l’accès mobile et/ou fixe à Internet dans un État, une ville ou toute autre zone géographique limitée. Pour ce document d’information, le blocage de contenu et la censure — c’est-à-dire l’interruption de l’accès à des destinations et contenus Internet spécifiques — doivent être considérés comme distincts et séparés.[2]

Où en sommes-nous ?

Les coupures d’Internet ont commencé à attirer l’attention du monde entier lors du soulèvement égyptien de 2011, lorsque les autorités ont coupé Internet pendant près d’une semaine pour perturber les communications des manifestants. (Williams, 2011) Depuis, l’utilisation de ces coupures à des fins politiques n’a cessé de croître.

En 2024, la plateforme Pulse de l’Internet Society (Pulse, 2025c) a recensé 133 incidents de coupures, soit une augmentation par rapport aux 124 incidents de l’année précédente. Cette escalade s’est poursuivie au premier semestre 2025, avec 40 incidents signalés.[2]

Bien que le phénomène soit mondial, les incidents de coupures suivis par la plateforme Pulse de l’Internet Society indiquent que l’Inde a connu le plus grand nombre de coupures documentées depuis 2019, suivie des régions MENA et Afrique subsaharienne.

Dans ce contexte, un nombre croissant d’organisations gouvernementales, économiques et de la société civile, d’organismes communautaires techniques et d’individus ont dénoncé les coupures d’Internet. La coalition KeepItOn! dirigée par AccessNow, par exemple, regroupe 345 organisations de plus de 106 pays.

Principaux points à considérer

Les coupures d’Internet ont des conséquences importantes sur le plan économique, des droits humains et technique. Elles sapent la confiance des utilisateurs dans Internet, déclenchant une série de conséquences pour l’économie locale, la fiabilité des services gouvernementaux essentiels en ligne, et même pour la réputation du pays et de son environnement numérique.

Les décideurs politiques doivent pleinement peser l’impact économique et social, ainsi que les impératifs de sécurité, lorsqu’ils envisagent une coupure d’Internet. Plutôt que de recourir à cet outil brutal et disproportionné, ils devraient privilégier des solutions efficaces, ciblées et respectueuses des droits qui maintiennent l’engagement fondamental en faveur d’un Internet ouvert, sans restriction et connecté à l’échelle mondiale.

Impact économique

Les coupures d’Internet affectent l’économie de nombreuses façons, en réduisant la productivité et en engendrant des pertes financières dans le cadre de transactions urgentes. Le calculateur NetLoss de la plateforme Pulse de l’Internet Society utilise des outils économétriques pour fournir une estimation rigoureuse de l’impact des coupures d’Internet sur le produit intérieur brut (PIB) des pays. (Mitchell, 2023)

Par exemple, le calculateur NetLoss estime que la décision du gouvernement du Bangladesh de couper l’accès à Internet pendant une journée lors de la crise constitutionnelle d’août 2024, par suite de la révolution de Juillet, a coûté à l’économie du pays 410 943 dollars américains. Bien qu’il s’agisse d’une estimation prudente de l’impact direct sur le PIB, ses conséquences réelles sont dévastatrices pour un pays moins avancé (PMA). Cette perte d’une seule journée équivaut au salaire journalier de plus de 75 000 travailleurs de l’industrie textile, essentielle au pays, perturbant les moyens de subsistance et les revenus des ménages. En outre, ce chiffre ne reflète pas les pertes en cascade subies par les milliers de petites entreprises, de travailleurs indépendants en ligne et de plateformes de commerce électronique qui dépendent entièrement de la connectivité Internet. Une coupure d’une semaine – un phénomène courant en période de troubles – porterait ces dommages économiques directs à près de 3 millions de dollars américains, soit l’équivalent du salaire journalier de plus de 525 000 personnes. Ce niveau de perturbation inflige des dommages bien plus importants et non quantifiables en érodant la confiance des investisseurs et en signalant que le pays n’est pas un endroit fiable pour faire des affaires dans l’économie numérique mondiale. Pour d’autres économies plus importantes, l’estimation serait multipliée ; si l’Italie, par exemple, décidait de couper l’accès à Internet pendant une journée, le coût serait estimé à près de 5 millions de dollars américains.

Les gouvernements qui ont recours de manière répétée aux coupures d’Internet comme outil politique risquent de mettre en péril les investissements étrangers dans le pays. C’est le cas de pays comme le Bangladesh, qui a enregistré 10 incidents entre 2018 et 2025, ou l’Irak, qui a enregistré 140 incidents entre 2018 et 2025. (Pulse, 2024, 2025b) En Irak, le recours aux coupures d’Internet a augmenté d’année en année, malgré l’absence de preuves de leur efficacité et la multiplication des voix d’organisations et d’experts qui mettent en lumière les impacts économiques négatifs de ces mesures.

Les préjudices économiques à long terme surpassent de loin tout bénéfice supposé à court terme des coupures d’Internet. Les investisseurs étrangers prennent en compte, entre autres facteurs, la disponibilité et la fiabilité de l’accès à Internet dans leur décision de faire des affaires dans le pays.

L’impact des coupures se fait certes sentir sur l’économie dans son ensemble, mais les entreprises très dépendantes des transactions électroniques sont particulièrement exposées à de graves conséquences. Par exemple, les paiements en ligne sont de plus en plus répandus, non seulement dans les pays développés, mais aussi dans les pays en voie de développement. Dans des pays tels que l’Inde, où le gouvernement a lancé un plan ambitieux de soutien à la démonétisation et aux paiements numériques, les coupures d’Internet fréquentes dans plusieurs États nuisent directement aux perspectives de l’économie numérique. (Bajoria, 2023)

Même si les coupures impliquent des risques financiers et de réputation pour les entreprises des TIC et leurs investisseurs, les impacts sur les économies secondaires, qui découlent d’un climat d’incertitude, peuvent décourager des investisseurs étrangers et avoir des conséquences en chaîne sur des secteurs très divers, notamment l’éducation, la santé, les transports publics, les services d’urgence et les entreprises. (Azim, 2025)

Impact sur les droits humains

Ces dernières années, la communauté des droits humains a renforcé ses efforts pour traiter l’impact des coupures d’Internet sur ces droits. Cela inclut le travail au sein des instances de l’ONU, comme celui de l’ancien Rapporteur spécial de l’ONU sur la liberté d’opinion et d’expression (HCDC, 2017), la résolution du Conseil des droits humains (CDHNU, 2016), ainsi que les initiatives d’organisations et de coalitions pour les droits numériques. (Freedom House, 2024 ; KeepItOn, 2025)

Impact technique

Lorsqu’une coupure complète d’Internet survient dans un pays, les impacts techniques peuvent dépasser les frontières nationales et affecter le reste de l’Internet mondial. L’appartenance à un réseau interconnecté implique une responsabilité vis-à-vis du réseau dans son ensemble, et les coupures peuvent engendrer des risques systémiques.

Les services ou applications Web développés et hébergés dans les pays touchés deviennent souvent populaires auprès des expatriés et/ou des émigrés. Les communautés élargies les utilisent fréquemment pour maintenir la communication, transférer de l’argent ou acheter des biens. D’autres services et applications hébergés peuvent être utilisés au sein de la chaîne d’approvisionnement mondiale d’une organisation internationale. Même si l’objectif principal d’une coupure d’Internet est de perturber l’accès dans le pays concerné, celle-ci entraîne également le blocage de ces services et applications pour le reste de l’Internet mondial, interrompant ainsi des communications personnelles, des transactions financières et des procédures commerciales cruciales.

La nature interconnectée d’Internet signifie également qu’une perturbation dans un pays peut avoir un impact significatif sur les pays voisins. Un exemple frappant est la coupure d’Internet au Soudan en avril 2013, qui a effectivement coupé l’accès au Tchad voisin. Cela s’est produit parce que le Tchad, un pays enclavé, dépend du Soudan pour ses connexions Internet internationales et ne dispose pas d’une route alternative. La coupure d’Internet au Soudan a également perturbé la connexion de transit dont dépendait le Tchad. (Polk, 2024)

Les coupures d’Internet à grande échelle peuvent également nuire au système de noms de domaine (DNS)[5]. Dans certains cas, les coupures sont mises en place de manière asymétrique : le trafic depuis l’Internet mondial n’arrive plus dans le pays concerné, mais le trafic sortant de ce pays atteint toujours l’Internet mondial. Ce type de situation induit un pic de requêtes DNS, car les systèmes du pays concerné tentent en vain d’effectuer la résolution des noms d’hôtes. Des réponses sont envoyées par les serveurs DNS, mais elles ne sont jamais reçues par les systèmes qui en sont à l’origine, qui renvoient donc leurs requêtes en continu. En fonction de la robustesse de l’infrastructure DNS de la source de l’autorisation, cette augmentation de la charge peut ralentir le temps de réponse du serveur, ou même rendre ce dernier indisponible.

De plus, certains utilisateurs disposent de résolveurs de DNS indépendants de leurs prestataires de services locaux. Si ces résolveurs locaux ne parviennent pas à effectuer la recherche demandée, les clients basculeront sur ces résolveurs secondaires. Cela peut entraîner la « fuite » d’informations vers des résolveurs et services basés hors du pays, mais également engendrer une charge non prévue sur cette infrastructure de résolution.

La politique de routage Internet est basée sur les relations entre les systèmes autonomes (AS), soit sur une base client-fournisseur, soit sur une base peer-to-peer. Dans ces deux cas, les interconnexions peuvent franchir les frontières nationales, et un réseau peut subir une baisse de sa disponibilité et, collatéralement, une augmentation de sa latence si le prestataire de services ou le réseau de pairs en amont est impacté par une coupure d’Internet, même si ces deux systèmes se trouvent dans des pays distincts.

Enfin, si les coupures d’Internet sont utilisées comme des moyens de coercition pour bloquer l’accès localement à un service ou à une application spécifique, l’accès à d’autres services peut également être impacté de manière collatérale. Par exemple, ordonner une coupure d’Internet pour bloquer l’accès aux services de réseaux sociaux limitera également l’accès local aux applications de covoiturage, de livraison de repas et de services bancaires en ligne, ce qui entraînera probablement une perturbation importante des services de transport. Cela peut se produire car différents services s’appuient souvent sur la même infrastructure sous-jacente ou sur les mêmes services cloud que les plateformes de réseaux sociaux ciblées. Ils peuvent partager des adresses IP avec d’autres services, ou le mécanisme de blocage peut être implémenté de manière trop peu précise pour distinguer les différents types de trafic.

Défis

La fréquence croissante des coupures d’Internet constitue une préoccupation majeure pour l’avenir du réseau. Même si les gouvernements peuvent être confrontés à des situations exigeantes qui motivent ces mesures, les coupures constituent une solution disproportionnée et inefficace qui a souvent des conséquences négatives imprévues.

Sécurité nationale et ordre public

Les gouvernements ont des craintes et des devoirs légitimes quant à la protection de l’ordre public et de la sécurité nationale pour leurs citoyens. Cependant, toute mesure restreignant la liberté d’expression ou d’association pour arriver à ces fins doit rester exceptionnelle, disposer d’un fondement légal et être strictement nécessaire et proportionnelle à son objectif légitime.

Lors des coupures, l’accès et la coordination des services d’urgence peuvent être compromis. Les citoyens manquent également d’accès à l’information et ont le sentiment que leurs droits fondamentaux sont violés, ce qui alimente le mécontentement et un sentiment d’insécurité qui peuvent générer des conséquences négatives pour la stabilité à long terme du pays.

Application et contrôle transfrontaliers

Les gouvernements sont confrontés à la difficulté d’appliquer leur propre législation nationale à un environnement en ligne marqué par des plateformes de contenus transfrontalières. Dans le contexte d’un Internet ouvert et connecté mondialement, pour obtenir la suppression de données considérées comme problématiques dans une juridiction spécifique, il ne suffit pas de demander au fournisseur local de supprimer lesdites données. Sans collaboration réelle de la part des plateformes concernées, cette complexité transfrontalière peut inciter certains gouvernements à opter pour une approche plus autoritaire, en bloquant complètement la possibilité d’accéder à ces plateformes.

Efficacité

Il n’existe actuellement aucune preuve de l’efficacité des coupures d’Internet pour résoudre les problèmes qu’elles sont censées traiter, par exemple lorsqu’elles visent à rétablir l’ordre public ou à empêcher la tricherie aux examens.

Une étude (Rydzak, 2019b) a même établi que l’arrêt complet des informations suite aux coupures d’Internet pouvait en réalité donner lieu à davantage de violence, avec l’adoption de stratégies violentes, qui dépendent moins de l’efficacité de la communication et de la coordination que des manifestations non violentes, qui ont quant à elles besoin d’Internet pour être organisées. De nombreux dommages collatéraux ont également été recensés suite à ces mesures, notamment des impacts sur les droits civiques, politiques, économiques, sociaux et culturels. (Rydzak, 2019a)

Des études ont montré que les coupures d’Internet n’empêchent pas la tricherie aux examens, ni d’autres méthodes plus proportionnées qui n’ont pas d’impact négatif sur des pays entiers, leurs économies et leurs habitants. (Cupler & Abrougui, 2022)

De plus, les coupures d’Internet ont tendance à attirer l’attention internationale et à engendrer des pressions sur les pays qui y ont recours. Cela donne en effet lieu au fameux « effet Streisand », selon lequel la tentative de réduire au silence ou de masquer des informations génère en réalité une attention accrue sur ce que l’on cherche à dissimuler.

Principes directeurs

Liberté d’expression

La liberté d’expression doit être la norme, et toute limitation de ce droit ne doit être qu’exceptionnelle. Le rôle central d’Internet dans la vie sociale et économique de ses utilisateurs a récemment entraîné l’adoption par l’ONU d’une résolution visant à défendre « la promotion, la protection et l’exercice des droits humains sur Internet ». (La promotion, la protection et l’exercice des droits humains sur Internet, s.d.) La résolution condamne les efforts déployés par l’État pour empêcher ou perturber intentionnellement l’accès à l’information en ligne.

Respect des procédures légales, proportionnalité et nécessité

En droit international, le respect des procédures légales est considéré comme l’incarnation des normes fondamentales de la justice naturelle. Outre le respect des procédures légales, la proportionnalité et la nécessité font partie des autres principes qui devraient guider les actions de tout décideur politique envisageant d’utiliser les coupures d’Internet comme outil de politique publique.

La nécessité signifie que toute restriction de l’accès à Internet doit se limiter à des mesures strictement et manifestement nécessaires pour parvenir à un but légitime. Il doit être établi qu’aucune autre mesure ne parviendrait à avoir des effets similaires de manière plus efficace et avec moins de dommages collatéraux.

La nécessité implique également l’évaluation de la proportionnalité des mesures. Toute restriction de l’accès à Internet doit être proportionnée. Une évaluation de la proportionnalité doit assurer que la restriction est « l’instrument le moins intrusif parmi ceux susceptibles d’atteindre le résultat désiré ». (HCDC, 1999) Cette limitation doit avoir un objectif spécifique et ne pas empiéter excessivement sur les autres droits des personnes ciblées.

Dans la plupart des cas, même une coupure de courte durée risque d’avoir des conséquences à long terme, qui se prolongeront longtemps après le rétablissement de la connectivité. La perte de confiance dans Internet en tant que plateforme fiable d’opportunités peut entraîner des impacts négatifs difficiles à quantifier. Les coupures soulignent également que le gouvernement considère qu’une telle mesure est acceptable, ce qui laisse à penser que l’économie du pays n’est pas encore prête à s’intégrer à l’économie numérique mondiale.

Recommandations

Les coupures d’Internet sont sans équivoque néfastes pour l’Internet mondial et pour les communautés locales. Les gouvernements doivent être conscients que les coupures d’Internet affectent de nombreux secteurs de la société, et il est impératif qu’ils s’engagent en faveur d’un Internet ouvert et sans restriction et adoptent une politique de non-coupure, plutôt que de recourir aux coupures comme outil politique.

Les gouvernements, la communauté technique et la société civile ont un rôle à jouer pour prévenir les effets négatifs des coupures d’Internet.

Recommandations pour les gouvernements

  • S’engager en faveur d’un Internet ouvert et sans restriction : les gouvernements devraient adopter une politique de non-coupure dans le cadre de leur engagement en faveur d’un Internet ouvert et sans restriction. Cette approche exige qu’ils se concentrent sur l’identification et la mise en œuvre de bonnes pratiques et de solutions efficaces à la source pour résoudre les problèmes, plutôt que de s’appuyer sur des restrictions d’accès strictes. Le partage d’expériences réussies entre régions peut accélérer l’adoption de ces solutions non restrictives. Les gouvernements devraient également faire preuve de transparence quant aux restrictions qu’ils imposent à l’accès à Internet.
  • Mesurer l’impact : pour préserver l’économie et maintenir la confiance et la fiabilité des infrastructures, les gouvernements devraient analyser l’impact négatif des coupures d’Internet sur la productivité, la confiance des entreprises et les investissements financiers à court et à long terme. Les perturbations du réseau entravent la productivité, affectent négativement la confiance des entreprises et peuvent nuire aux investissements financiers au fil du temps. Les gouvernements doivent donc être très clairs sur les implications de leur utilisation.

Recommandations pour la communauté technique et les acteurs du secteur

  • Créer des infrastructures résilientes : la communauté technique d’Internet, les groupes industriels et les gouvernements locaux jouent un rôle primordial dans le développement de solutions de connectivité résilientes. Des points d’échange Internet plus nombreux et mieux répartis, ainsi qu’une plus grande diversité de connexions Internet aux frontières internationales, rendront plus difficile et laborieuse pour les gouvernements la mise en œuvre efficace d’un « interrupteur unique ».
  • Diversifier les voix : les sociétés de capital-risque et les investisseurs doivent intégrer les coupures d’Internet dans leur évaluation des risques. Il faut également reconnaître plus largement que les coupures d’Internet peuvent complètement saper la capacité des petites et moyennes entreprises, y compris celles qui ne font pas partie du secteur des TIC, à fonctionner et à contribuer à l’avenir de l’économie.

Recommandations pour la société civile

  • Assurer une fonction de surveillance : les organisations de la société civile et les autres partenaires devraient continuer à suivre et à documenter l’impact des coupures d’Internet et jouer un rôle clé en appelant les gouvernements à rendre des comptes et à faire preuve de transparence. Aux côtés de ces acteurs, la communauté technique devrait renforcer ses efforts de surveillance et de mesure d’Internet et rendre les outils et les données associés accessibles au public. Une amélioration de la capacité à analyser activement et passivement les données collectées, à la fois à l’intérieur et à l’extérieur des réseaux, peut assurer une meilleure visibilité des coupures d’Internet, notamment en ce qui concerne leur portée, leur durée et leur impact.
  • Sensibiliser : les organisations de la société civile devraient sensibiliser le public et la communauté internationale aux coûts humains, économiques et démocratiques des coupures d’Internet. Elles devraient également renforcer les capacités des groupes et des militants locaux à se préparer et à réagir.

Ressources supplémentaires

Outil de suivi des coupures de la plateforme Pulse de l’Internet Society
https://pulse.internetsociety.org/shutdowns

Position de l’Internet Society sur les coupures d’Internet
https://www.internetsociety.org/fr/resources/doc/2019/position-de-linternet-society-sur-les-fermetures-dinternet/

L’économie numérique de l’Afrique ne peut pas se permettre de subir des coupures d’Internet
https://pulse.internetsociety.org/fr/blog/africas-digital-economy-cant-afford-shutdowns

Les coupures d’Internet liées aux élections vont-elles se poursuivre en 2025 ?
https://pulse.internetsociety.org/fr/blog/will-election-related-internet-shutdowns-continue-in-2025

Le coût humain des coupures d’Internet en Inde
https://pulse.internetsociety.org/blog/the-human-cost-of-internet-shutdowns-in-india

Pourquoi il est difficile de mesurer les coupures régionales
https://pulse.internetsociety.org/blog/why-it-is-challenging-to-measure-regional-shutdowns

Le droit fondamental à Internet n’a pas empêché les coupures d’Internet. Il est temps de porter l’affaire devant les tribunaux
https://pulse.internetsociety.org/blog/a-human-right-to-the-internet-hasnt-stopped-internet-shutdowns-its-time-to-take-it-to-court

#KeepItOn Campaign. Access Now. https://www.accessnow.org/keepiton/

Déclaration conjointe de la Freedom Online Coalition sur la protection des droits humains en ligne et la prévention des coupures d’Internet en temps de conflit armé
https://freedomonlinecoalition.com/joint-statement-on-protecting-human-rights-online-and-preventing-internet-shutdowns-in-times-of-armed-conflict/

Références

Azim, S. (2025, March 4). The Human Cost of Internet Shutdowns in India. Internet Society Pulse. https://pulse.internetsociety.org/blog/the-human-cost-of-internet-shutdowns-in-india

Bajoria, J. (2023). “No Internet Means No Work, No Pay, No Food.” Human Rights Watch. https://www.hrw.org/report/2023/06/14/no-internet-means-no-work-no-pay-no-food/internet-shutdowns-deny-access-basic

Cupler, S., & Abrougui, A. (2022). Internet Shutdowns to Prevent Cheating During Exams: The Impact on Society and Economy in the MENA Region. SMEX. https://smex.org/internet-shutdowns-to-prevent-cheating-during-exams-the-impact-on-society-and-economy-in-the-mena-region/

Freedom House. (2024). The Struggle for Trust Online (Freedom on the Net). Freedom House. https://freedomhouse.org/report/freedom-net/2024/struggle-trust-online

HRW. (2020). End Internet Shutdowns to Manage COVID-19 | Human Rights Watch [Press Release]. Human Rights Watch. https://www.hrw.org/news/2020/03/31/end-internet-shutdowns-manage-covid-19

KeepItOn. (2025). Emboldened offenders, endangered communities: Internet shutdowns in 2024 (KeepItOn Reports). Access Now. https://www.accessnow.org/keepiton-2024-report

La Rue, F. (2011). Report of the Special Rapporteur on the promotion and protection of the right to freedom of opinion and expression (No. A/HRC/17/27). United Nations Human Rights Council. https://ap.ohchr.org/documents/dpage_e.aspx?si=A/HRC/17/27

Mitchell, R. (2023, June 28). Measure the Economic Impact of Internet Shutdowns with the Internet Society Pulse NetLoss Calculator. Internet Society Pulse. https://pulse.internetsociety.org/blog/measure-the-economic-impact-of-internet-shutdowns-with-the-internet-society-pulse-netloss-calculator

Mitchell, R. (2024, April 1). Tracking Internet Shutdowns in 2024, Q1. Internet Society Pulse. https://pulse.internetsociety.org/blog/tracking-internet-shutdowns-in-2024-q1

OHCHR. (1999). CCPR General Comment No. 27: Article 12 (Freedom of Movement) (p. Paragraph 14). Office of the High Commissioner for Human Rights. https://www.refworld.org/legal/general/hrc/1999/en/46752

OHCHR. (2017). Report on the role of digital access providers (No. A/HRC/35/22). Office of the High Commissioner for Human Rights. https://www.ohchr.org/en/calls-for-input/report-role-digital-access-providers

Polk, R. (2024, August 22). Another Outage Shows Challenges Facing Chad’s Internet Infrastructure. Internet Society Pulse. https://pulse.internetsociety.org/blog/another-outage-shows-challenges-facing-chads-internet-infrastructure

Pulse. (2024, August 4). Shutdowns for Bangladesh. Internet Society Pulse. https://pulse.internetsociety.org/en/shutdowns/

Pulse. (2025a). Frequently Asked Questions. Internet Society Pulse. https://pulse.internetsociety.org/faq#internet-shutdowns

Pulse. (2025b, August 31). Shutdowns for Iraq. Internet Society Pulse. https://pulse.internetsociety.org/en/shutdowns/

Pulse. (2025c, August 31). Shutdowns Tracker. Internet Society Pulse. https://pulse.internetsociety.org/en/shutdowns/

Rydzak, J. (2019a). Disconnected: A Human Rights-Based Approach to Network Disruptions. Global Network Initiative. https://globalnetworkinitiative.org/wp-content/uploads/Disconnected-Report-Network-Disruptions.pdf

Rydzak, J. (2019b). Of Blackouts and Bandhs: The Strategy and Structure of Disconnected Protest in India (SSRN Scholarly Paper No. 3330413). Social Science Research Network. https://papers.ssrn.com/abstract=3330413

Skok, Z. R., Felicia Anthonio, Sage Cheng, Carolyn Tackett, Alexia. (2023, February 28). Internet shutdowns in 2022: The #KeepItOn Report. Access Now. https://www.accessnow.org/internet-shutdowns-2022/

The promotion, protection and enjoyment of human rights on the Internet. (n.d.). Retrieved September 8, 2025, from https://ap.ohchr.org/documents/dpage_e.aspx?si=A/HRC/32/L.20

UNGA. (1966). International Covenant on Civil and Political Rights (No. General Assembly resolution 2200A (XXI)). https://www.ohchr.org/en/instruments-mechanisms/instruments/international-covenant-civil-and-political-rights

UNHRC. (2016). The promotion, protection and enjoyment of human rights on the Internet (No. A/HRC/32/L.20). United Nations Human Rights Council. https://ap.ohchr.org/documents/dpage_e.aspx?si=A/HRC/32/L.20 Williams, C. (2011, January 28). How Egypt shut down the internet. The Telegraph. https://www.telegraph.co.uk/news/worldnews/africaandindianocean/egypt/8288163/How-Egypt-shut-down-the-internet.html


Notes

[1] Notamment pour violation de la loi sur les droits de propriété intellectuelle

[2] Veuillez-vous référer à la Fiche d’orientation politique : points de vue sur le blocage de contenu Internet de l’Internet Society pour plus d’informations sur ces actions.

[3] Une modération temporaire de la tendance des coupures d’Internet a été observée en 2021 (68 incidents) et en 2022 (54 incidents), après un pic de 167 incidents en 2020. Cela pourrait s’expliquer en partie par une prise de conscience accrue de l’importance de la disponibilité d’Internet pendant la pandémie de COVID-19. La tendance générale, toutefois, indique un retour à une augmentation des coupures d’Internet. (HRW, 2020; Skok, 2023)

[4] Voir l’ancien rapporteur spécial des Nations Unies sur la proportionnalité des coupures d’Internet : http://www.ohchr.org/EN/Issues/FreedomOpinion/Pages/SR2017ReporttoHRC.aspx, Résolution du Conseil des droits humains : https://documents.un.org/doc/undoc/ltd/g16/131/89/pdf/g1613189.pdf

[5] Le système de noms de domaine (DNS, Domain Name System) est un système hiérarchique de dénomination décentralisé pour les ordinateurs, les services ou d’autres ressources connectées à Internet ou à un réseau privé. Il traduit les noms de domaine conviviaux (comme www.internetsociety.org) en adresses IP numériques (comme 104.18.17.166), que les ordinateurs utilisent pour s’identifier sur le réseau.

[6] Un système autonome (AS) est un grand réseau ou un groupe de réseaux géré par une seule entité, comme un fournisseur d’accès à Internet (FAI) ou une grande entreprise. Chaque AS possède un numéro de système autonome (ASN) unique et une politique de routage spécifique, qu’il utilise pour échanger du trafic avec d’autres AS sur Internet.

, Mondial,
  • Internet_Shutdowns-Policy-Brief-FR thumbnail

    Coupures d’Internet

    Télécharger

Ressources associées

Réduire la fracture numérique 7 octobre 2025

Politiques en matière de spectre: Une fiche d’orientation de l’Internet Society sur les politiques publiques

Nous avons besoin de mesures politiques et réglementaires délibérées pour garantir la disponibilité du spectre pour les initiatives communautaires.

Promouvoir un Internet sûr et digne de confiance 4 septembre 2025

Fiche d’orientation politique: points de vue sur le blocage de contenu Internet 

L’Internet Society encourage les décideurs politiques à privilégier les solutions qui s’attaquent aux contenus préjudiciables à la source, plutôt...

Promouvoir un Internet sûr et digne de confiance 20 décembre 2024

Un cadre politique pour les intermédiaires et le contenu Internet

Les intermédiaires sont essentiels à l’existence d’Internet. Ce document fournit un cadre pour comprendre les rôles des intermédiaires Internet et...